19

« Bien qu’il ait eu l’esprit d’un employé ou d’un maître d’école ordinaire, il était dominé par un autre Himmler dont l’imagination était guidée par des phrases du type : « La préservation de la Race allemande justifie tous les actes de cruauté » ou « Il faut une obéissance inconditionnelle au Führer ». Cet autre Himmler pénétrait des domaines qui dépassent la simple compréhension humaine et ouvrent à d’autres mondes. »

 

Félix Kerton

 

« Pour nous la fin de cette guerre sera signifiée par une route ouverte vers l’Est, et la création d’un Grand Reich allemand qui s’étendra dans toutes les directions... »

 

Heinrich Himmler

 

Holly se glissait le long du couloir sur la pointe des pieds, avec une souplesse de chat, pour ne pas faire craquer les lattes du plancher. Elle ressentait dans l’atmosphère une tension qui n’avait rien à voir avec sa propre nervosité. L’air en était saturé.

Elle était très intriguée par l’étrangeté de la demeure, moitié maison moitié château. Pourquoi une telle construction ? Elle avait voulu se diriger vers l’arrière de la bâtisse et ces pièces à la décoration médiévale qu’elle avait vues de l’extérieur, mais le couloir qu’elle avait suivi s’était terminé abruptement par un mur. Et il était évident qu’elle n’avait pas parcouru la distance correspondant à la largeur de la maison. Elle était donc revenue vers l’escalier monumental, dans la partie avant.

Devinant qu’elle courait plus le risque de rencontrer des gardes si elle descendait au rez-de-chaussée, la jeune femme décida de monter au deuxième étage pour chercher un passage vers l’arrière de la maison. Elle gravit les marches sans bruit, le pistolet-mitrailleur prêt à l’usage. Elle regrettait maintenant de ne pas avoir fouillé le garde inconscient. L’arme était inspirée de l’Ingram MAC II et, en toute logique, elle devait elle aussi être pourvue d’un silencieux ultra-léger. Dans sa situation il lui aurait été bien utile, mais elle se fit une raison. Si quelqu’un la découvrait elle tirerait pour tuer ; elle n’avait pas le choix.

Elle atteignit le palier du deuxième étage et s’immobilisa pour écouter. Pas un bruit.

Face à elle s’étendait le couloir traversant la bâtisse dans sa largeur tandis qu’un autre partait latéralement du palier, à droite et à gauche. Elle allait s’engager dans le premier quand une porte s’ouvrit devant elle.

Sa réaction fut immédiate : d’un bond de côté elle se cacha derrière le mur d’angle, prête à courir si les pas se rapprochaient. Mais leur bruit diminua. Elle risqua un coup d’œil dans le couloir principal et reconnut la femme qu’ils appelaient Kristina. Elle pressait une main sur sa joue comme si elle avait été frappée et Holly la vit chanceler et s’appuyer un instant contre le mur. La photographe retint son souffle jusqu’à ce que l’autre disparaisse.

Son intuition lui disait qu’il y avait chez cette femme quelque chose de très étrange, sans trop pouvoir définir la raison de cette impression. Mais elle se souvenait du malaise ressenti en sa présence lorsque Gant la lui avait présentée. .

Kristina avait maintenant disparu au fond du couloir. Il y avait donc sans doute un accès à l’autre partie de la maison. Holly n’hésita qu’une seconde puis elle s’élança à sa suite.

Arrivée au bout du couloir, elle découvrit qu’il se terminait en forme de T et choisit la branche de droite. Celle-ci donnait sur une porte en chêne massif sculpté qui ne devait pas être celle d’un placard à balai. Holly essaya la clenche de fer forgé qui résista. La porte était fermée.

Elle revint alors sur ses pas et parcourut l’autre section du couloir. Une porte identique la barrait, mais celle-ci n’était pas verrouillée.

Holly eut l’impression de pénétrer dans un autre univers. Les murs du couloir étaient ici de pierre grise et les portes qui les perçaient toutes de bois patiné et ouvragé. L’éclairage était volontairement faible, accentuant l’atmosphère médiévale des lieux. Holly referma la porte de communication entre les deux parties de la maison et avança. La tension qu’elle détectait lui parut plus forte encore ici que dans l’autre partie.

Elle parcourut quelques mètres avant de s’arrêter devant une des portes. Aucun son ne filtrait. Sur le panneau elle remarqua un nom gravé, mais le peu de lumière en rendait la lecture difficile : Philippe de... Souabe ? Où diable se trouvait la Souabe ? Elle alla jusqu’à la porte suivante. Celle-ci portait un nom encore plus difficile à déchiffrer. Frédéric Hohen... Quelle signification avaient ces noms ? Elle tendit de nouveau l’oreille mais ne détecta pas le moindre bruit. Après une hésitation, elle posa doucement la main sur la clenche et la fit tourner. La porte n’était pas fermée. Elle entrebâilla le battant et jeta un coup d’œil dans la pièce obscure, l’arme braquée. Mais l’endroit semblait réellement désert. Elle ouvrit la porte en grand et la lumière chiche du couloir dessina l’intérieur de la pièce.

La chambre sentait le renfermé, comme celles qui n’ont pas été occupées depuis longtemps. Le mobilier en était ancien, dominé par un énorme lit à baldaquin. Elle remarqua un portrait en pied d’un individu en tenue d’apparat. Peut-être ce Frédéric Hohen-quelque chose. Elle referma la porte et alla jusqu’à la suivante. Celle-ci portait le nom d’Henri Ier, et son instinct lui murmura qu’elle était occupée. Devait-elle entrer ou non ? Elle hésita une seconde, puis décida qu’elle ne trouverait pas Harry si elle ne le cherchait pas vraiment. Elle ouvrit la porte sans bruit.

L’odeur frappa aussitôt ses narines, une odeur infecte, comme une souillure invisible. Elle eut l’impression qu’un esprit fait de pure malveillance se précipitait vers elle et s’engouffrait dans l’ouverture qu’elle venait de créer. C’était un mélange de poussière, de sueur humaine et d’autre chose... De la viande décomposée ? Non, c’était indéfinissable. Elle serra les dents et repoussa complètement le battant.

Elle vit d’abord les étagères chargées de livres qui occupaient les murs. Cette chambre était plus grande que l’autre, et son mobilier plus fourni. Elle distingua un bureau de belle taille, deux chaises à haut dossier, un tapis épais aux motifs complexes et, au mur sur sa gauche, un tableau encadré par les rayonnages. Cette fois encore le personnage représenté portait des vêtements médiévaux. Sans doute Henri Ier, songea-t-elle. En face, sur le mur de droite, une autre toile dont le sujet était un homme sanglé dans l’uniforme noir de la SS. Les nazis aimaient à se comparer à leurs vieux héros.

Un bruit ténu attira son attention vers le bureau. Quelqu’un ou quelque chose avait bougé dans les ombres, là-bas. Nerveusement, elle pointa le pistolet-mitrailleur dans cette direction. Derrière le bureau, entre les deux lourds rideaux de la fenêtre, pendait le drapeau à croix gammée. Holly se sentait soudain épiée, comme si les deux portraits la surveillaient. Elle chassa cette impression irrationnelle et tendit l’oreille.

De nouveau, elle perçut le son. C’était comme un glissement sur le sol, derrière le meuble.

Sa première envie fut de sortir au plus vite de la pièce, mais elle la repoussa aussitôt. Si quelqu’un se cachait derrière le bureau, quelqu’un qui avait vu son arme, l’alarme serait donnée dès qu’elle aurait quitté la chambre. Elle n’avait pas d’autre choix que de le neutraliser.

Elle avança vers le bureau, tous les sens aux aguets. C’était un meuble imposant, trop large pour qu’elle puisse voir derrière sans se pencher. L’odeur était plus forte maintenant, et c’était celle d’un corps humain souillé qui dominait.

La réaction naturelle aurait été de contourner rapidement mais avec prudence le bureau. Holly opta pour une autre solution : elle passa par-dessus le meuble et pointa l’arme juste derrière. Elle se rendit alors compte qu’elle s’était trompée. Le mouvement ne venait pas de sous ou de derrière le bureau mais de plus loin, près du mur.

Cela ressemblait à un paquet de linges, mais malgré la faible clarté venant du couloir, elle discerna l’éclat des prunelles terrorisées qui la fixaient. L’inconnu paraissait se coller contre le mur comme pour s’y enfoncer. C’était le bruit qu’elle avait entendu : le son d’un corps qui se traînait, au prix d’un immense effort, le plus loin possible d’elle.

Elle descendit du bureau et s’accroupit auprès de la forme tremblante. C’était un homme et il était ligoté avec art et cruauté : un nœud coulant enserrait sa gorge, relié à ses mains et ses pieds liés derrière son dos, de sorte que le moindre mouvement tirait sur la corde et l’étranglait. Son cou et ses poignets étaient poissés de sang frais, sans doute dû à ses efforts dérisoires pour fuir l’arrivante. Sa chemise sale était ouverte sur un torse couvert d’hématomes, et l’odeur qui émanait de lui révélait qu’il avait uriné plusieurs fois sur lui à cause de la peur ou de la douleur. Ses cheveux étaient complètement blancs, mais en regardant ses yeux effrayés elle se rendit compte que ce n’était pas un vieil homme. Son visage était marqué de lignes de souffrance, ses yeux lourdement cernés et ses lèvres craquelées, et elle comprit que c’était un homme jeune qui avait vieilli physiquement à la suite d’épreuves terribles. La torture, songea-t-elle. Elle avait déjà vu ce genre de réaction chez des prisonniers du Viêt-Nam rendus à leur pays. La plupart avaient perdu l’esprit.

— Qui êtes-vous ? murmura-t-elle.

Les yeux de l’inconnu la fixaient avec terreur, mais il ne répondit pas.

— Vous pouvez me parler ? Me dire qui vous êtes ? Écoutez, je suis une amie. Je ne suis pas avec eux mais contre eux. Cette nuit il va se passer quelque chose que je dois absolument empêcher, et il ne reste plus beaucoup de temps. Vous devez me dire qui vous êtes.

Elle avança une main pour lui toucher l’épaule dans un geste rassurant et il fit un effort désespéré pour éviter le contact. Le mouvement resserra le nœud coulant. Un gargouillis de douleur lui échappa.

— Eh ! calmez-vous...

Elle saisit ses poignets et le souleva légèrement pour agrandir le nœud coulant. Il cessa de se tortiller. Elle se demandait s’il avait compris la manœuvre ou s’il réagissait par pur instinct animal.

— Écoutez, chuchota-t-elle, je vais vous délivrer. Mais avant je veux que vous compreniez une chose : je ne suis pas avec ceux qui vous ont fait ça. Je suis une amie, d’accord ?

Elle posa le pistolet-mitrailleur sur le sol et se mit au travail. Les nœuds fixant la corde autour des poignets étaient tellement serrés qu’elle ne put les défaire. Il lui fallait quelque chose de pointu à insérer entre les boucles. Un coupe-papier sur le bureau lui permit de défaire un nœud, puis un autre, mais cela lui prit plusieurs minutes. Enfin les mains de l’homme furent libres.

Avec un soupir satisfait, Holly ôta la corde. Elle examina ses mains avec une moue fataliste. Elle s’était cassé plusieurs ongles et ses doigts étaient douloureux.

Soudain l’homme la repoussa violemment, avec une force que son apparence fragile ne laissait pas soupçonner, et elle roula sur le côté. Quand elle se redressa il s’était agenouillé et braquait sur elle le pistolet-mitrailleur.

— Ne bougez pas, siffla-t-il en anglais, avec un fort accent étranger.

Il devait serrer l’arme entre ses deux mains pour ne pas trembler.

— Eh ! j’essaie de vous aider, protesta Holly en se figeant et maudissant son imprudence. Nous sommes du même côté...

Les yeux de l’inconnu brillaient d’un éclat fiévreux, mais toute peur en avait disparu.

— Qui êtes-vous ? Et pourquoi êtes-vous ici ?

Elle décida de jouer la prudence tant qu’elle n’en saurait pas plus sur son compte.

— Je m’appelle Holly Miles et je suis journaliste indépendante. Je faisais un article sur Edward Gant et les ventes d’armes quand j’ai découvert qu’il préparait quelque chose de beaucoup plus sinistre... Vous ne voulez pas me dire votre nom ? Je ne suis pas avec Gant, je vous le jure.

Il survola la pièce d’un regard de bête traquée avant de la dévisager un long moment en silence.

— Je vous ai libéré, non ? rappela Holly.

Il s’adossa contre le mur, comme si l’effort fourni avait sapé ses forces, puis s’assit et allongea les jambes devant lui. Ses pieds nus touchaient presque les genoux de Holly. Ses chevilles étaient toujours liées ensemble.

— Détachez-les, ordonna-t-il.

Elle se remit au travail avec le coupe-papier.

— Pourquoi une journaliste a-t-elle une arme ? fit-il après quelques secondes, prouvant que son esprit fonctionnait bien malgré son état physique.

Cette fois Holly choisit de tout lui dire. Il n’y avait plus de temps à perdre, et elle n’avait d’autre choix que de faire confiance à cet inconnu. Elle crut le voir réagir à la mention de Harry Steadman lui aussi prisonnier dans la bâtisse, et il se redressa avec nervosité quand elle lui révéla l’attentat projeté par Gant.

— Où est le site de lancement ? dit-il.

— Derrière la maison, dans la falaise.

Elle libéra ses chevilles et il essaya de se lever, mais la circulation sanguine n’était pas encore rétablie et il chancela. Comme elle faisait un geste pour l’aider, il la força à reculer avec le canon de l’arme.

— Vous devez me faire confiance ! s’exclama-t-elle. On peut venir à tout moment !

Il passa une main sur son visage et grimaça en effleurant les hématomes.

— Je... Je ne sais pas. Ils m’en ont tant fait subir... Je n’arrive plus à penser.

— Depuis combien de temps vous gardent-ils prisonnier ?

— Des années... Non, ce n’est pas possible. Je ne sais pas... Ils m’ont utilisé... ils se sont servi de mon énergie. (L’homme secoua la tête avec désespoir.) Ils m’ont gardé dans sa chambre pour qu’il puisse se nourrir de mon énergie...

— Qui ? le pressa Holly, déconcertée par l’intensité de ses paroles. Qui s’est nourri de votre énergie ?

— Lui...

Il pointa le pistolet-mitrailleur sur le tableau au mur derrière eux. Elle vit son index se crisper sur la détente et pendant un instant le crut prêt à tirer sur la toile.

— Non ! Vous alerteriez tout le monde.

Il hésita puis baissa l’arme, et Holly fut soulagée qu’il ne la menace plus. Mais elle restait très intriguée par ses propos.

— Comment s’est-il nourri de votre énergie ?

— Ils... ils m’ont frappé. Ils me gardaient ligoté, ici... Et lui... C’est ainsi qu’il survit. Il prend... la force des autres... Leur vitalité...

Holly secoua la tête. Elle ne comprenait rien. Mais il y avait des choses plus urgentes. Sa montre marquait minuit trente-cinq.

— Il faut que nous agissions, dit-elle d’un ton décidé. Vous devez me faire confiance.

Il acquiesça, conscient qu’il n’avait pas d’autre choix. Une partie de ses forces lui revenaient, mais dans son état il n’aurait pu dire pour combien de temps. Ils l’avaient à peine nourri, lui donnant juste assez pour le maintenir en vie. Combien de temps cela avait-il duré ? Des années ? Ou seulement des semaines, comme il commençait à le soupçonner ? Il avait perdu toute notion du temps ici. Les coups, il avait pu les supporter, au début du moins, mais c’est le reste qui l’avait brisé. L’humiliation. Ce qu’ils l’avaient forcé à faire avec cette créature ni homme ni femme, l’avilissement qu’ils avaient savouré devant lui... La honte brouilla sa vision et il chassa les larmes d’un revers de main.

Il leur avait révélé tout ce qu’ils voulaient savoir, car ils l’avaient très vite réduit au stade d’animal terrorisé. Cet homme, Kôhner, connaissait bien toutes les parties sensibles du corps et comment en tirer le maximum de douleur, par une variété de procédés qui semblait infinie. Pourtant ce n’était pas là le pire. L’horreur avait vraiment commencé avec ces nuits passées ici, dans cette pièce, quand l’autre était venu pour se repaître de son abaissement et de sa vitalité, comme un parasite. Était-il possible qu’il ait tout imaginé ? se demanda-t-il une fois encore. L’avaient-ils rendu fou par la torture ?

Mais il se souvenait du plus terrible, quand ils l’emmenaient sous la grande salle, dans ce lieu qu’ils appelaient la crypte. Là, toutes les autres horreurs avaient été surpassées.

Il sentit la jeune femme qui le secouait et rouvrit les yeux. Oui, il devait lui faire confiance. Parce que c’était la seule possibilité.

— M’aiderez-vous ? disait-elle.

Il hocha la tête et elle lui prit doucement le pistolet-mitrailleur de la main. Il n’opposa aucune résistance.

— Alors dites-moi d’abord qui vous êtes. Votre nom.

— Baruch Kanaan, bredouilla-t-il. Je m’appelle Baruch Kanaan.

 

Le commissioner regarda le cercle de visages tendus autour de lui. L’intérieur de l’église avait été transformé en PC opérationnel. Il savait que ses hommes étaient rongés par l’impatience. L’attente était toujours le moment le plus désagréable dans ce genre de situation, et lui-même la supportait difficilement. Mais l’expérience lui avait appris ses bienfaits, et Sir Robert avait su le convaincre de ne rien faire avant le moment propice.

Le commissioner vit l’homme nommé Blake qui l’observait, du coin où il s’était installé. Le visage de l’ex-policier était tendu par l’anxiété, et le commissioner lui fit signe. Blake s’approcha aussitôt.

— Nous allons passer à l’action d’un moment à l’autre, Mr. Blake, dit-il d’un ton rassurant. Mais pour l’instant nous attendons l’arrivée du dernier invité de Gant. Les autres sont déjà rassemblés. Ils sont sous surveillance depuis des semaines et nous sommes sûrs qu’ils sont tous dans la maison de Gant. Ils constituent un groupe diantrement puissant, c’est pourquoi nous ne pouvions pas foncer et les arrêter sur la simple présomption de conspiration contre la sécurité de l’Etat. Il faudra les isoler et les faire craquer séparément. J’ai passé une bonne partie de la journée chez le Premier ministre avec nos collègues américains de la CIA. Nous avons fini par le persuader que c’était la meilleure méthode.

La CIA, le Premier ministre... Sexton était surpris de l’ampleur de l’affaire.

— Nous avons certes des preuves contre eux, poursuivit le commissioner, mais indirectes. Nous devons les prendre sur le fait et, comme je l’ai dit, les faire avouer individuellement. Grâce à votre employeur, Mr. Steadman, cela ne devrait pas être trop difficile. Il semble avoir dérangé un sacré nid de vipères...

— Mais comment saviez-vous que Harry, je veux dire : Mr. Steadman, était impliqué dans cette affaire ?

Le commissioner leva une main comme pour arrêter le flot de questions qu’il sentait prêt à se déverser.

— Nous connaissons le rôle de Nigel Pope depuis quelque temps déjà ; son intolérance envers ses supérieurs et ses propres collègues pouvait difficilement passer inaperçue. Mais il était impliqué dans ce plan et nous ne pouvions pas l’écarter sans détruire tout notre dispositif. Il fallait laisser les choses grandir pour pouvoir éradiquer le mal une bonne fois pour toute, et seulement au bon moment. Harry Steadman nous a, sans le savoir, permis de préparer notre action. D’une certaine façon, il nous a servi à extirper le poison.

— Vous auriez pu le prévenir.

— Non, Mr. Blake. Jusqu’à très récemment nous n’étions pas sûr de son rôle dans cette affaire. Il est apparu d’un coup, et a priori il était avec eux.

— Mais que faites-vous de la mort de Mrs. Wyeth ! s’exclama Sexton, outré.

Le commissioner ne cacha pas son embarras.

— Nous ne savions pas que votre agence était impliquée, j’en ai bien peur. C’est très regrettable... (Il posa sur l’ex-policier un regard calme.) Nous n’avons été fixés sur Mr. Steadman que lorsqu’il nous a contactés par votre intermédiaire, la nuit dernière.

Sexton secoua la tête avec lassitude.

— Je ne prétends pas comprendre tous les ressorts de la situation actuelle, commissioner, mais j’ai l’impression que personne ne s’est soucié des risques que courait Harry. On l’a utilisé de tous les côtés, et encore maintenant il est seul à jouer sa vie.

L’homme de la CIA s’approcha d’eux.

— Non, Mr. Blake. Nous avons quelqu’un qui veille sur lui depuis quelque temps déjà. Se tournant vers le commissioner il dit d’un ton redevenu bref : Le dernier hélicoptère vient d’arriver. Le général a rejoint les autres.

— Parfait. Je vais donner les ordres immédiatement.

— Et on m’a signalé des mouvements dans la propriété de Gant. Ses hommes se sont postés un peu partout sur son périmètre. (L’Américain consulta sa montre et fronça les sourcils, l’air soucieux.) J’aimerais beaucoup savoir si cette réunion a un rapport avec l’arrivée cette nuit en Angleterre du vice-Président.

— Ils nous le diront eux-mêmes.

— J’en doute.

Le commissioner ne prit pas la peine de répondre. Il donna des ordres autour de lui aux officiers des Forces spéciales. Ceux-ci rejoignirent aussitôt leurs groupes. Alors seulement il se retourna vers l’agent de la CIA :

— Je suivrai juste derrière la première vague d’assaut. Vous m’accompagnerez ?

— Bien sûr, dit l’autre avec un sourire. Je ne voudrais pas rater ça.

— Quant à vous, Mr. Blake, je suis désolé mais je crains que vous ne deviez rester ici, dit le commissioner avant de s’éloigner.

L’Américain et Sexton le virent sortir de l’église avec les derniers hommes des Forces spéciales. L’homme de la CIA allait l’imiter quand l’ex-policier l’apostropha :

— Vous avez dit que quelqu’un veillait sur Harry depuis quelque temps. Qui est-ce ?

— Un de nos agents, répondit l’autre. Une femme nommée Holly Miles. Nous l’avons empruntée au département des Affaires intérieures pour la mettre sur ce coup parce qu’elle a un lien de parenté réel avec la dernière femme de Gant : une carte de visite inespérée. En ce moment elle se trouve avec Steadman dans la propriété.

L’Américain sortit à son tour, laissant Blake seul et perplexe dans la vieille église.

La lance
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